NOUS EXISTONS! L’invisible clientèle pluriculturelle des spas et instituts de beauté.

client noir institut spa

La frontière entre marques cosmétiques généralistes et ethniques s’estompe progressivement.  Qu’elles soient de parfumerie (Lancôme) ou de grande distribution (L’Oréal, Dove, She Moisture), les marques de maquillage, de soin ou de soin capillaire tendent à se globaliser et à s’adresser à une clientèle multiculturelle.

On ne peut pas du tout en dire autant pour les marques professionnelles (en institut et en spas)!  Les causes de cette invisibilité ethnique sont à chercher auprès de tous les acteurs de l’industrie : monde éducatif, marques, spas … et clients.  Analyse à 360° et en 4 axes. 

 

AXE 1 – Une invisibilité dès les écoles d’esthétique.

 

Durant mon cursus d’esthéticienne, nous n’avons jamais abordé les spécificités des peaux foncées.  « La peau, c’est la peau ! » fut systématiquement la réponse que je recevais.  Or, au travers de ce blog, les différentes caractéristiques et problématiques des peaux foncées sont souvent démontrées et abordées: pilosité, hyperpigmentation, blanchiment, déshydratation, acné, cicatrisation… 

Enfin, pour être exacte, si, nous avons quand même UNE FOIS envisagé une clientèle noire:  lors du module de maquillage correctif.  Pour entendre et apprendre quoi ?  « Comment affiner des lèvres trop lippues ou estomper un nez trop épaté » !!!  Les esthéticiennes intègrent donc dès les études que, premièrement, la clientèle ethnique n’existe pas,  deuxièmement, que les peaux foncées n’ont pas de réelles spécificités et troisièmement,  que les traits naturels négroïdes sont des défauts à corriger.  Une horreur !  A présent que je forme aussi des (futurs) professionnels, dans le privé et dans le public,  de la formation initiale à la formation continue, je constate que le programme officiel belge (le seul auquel je peux me référer avec certitude) ne traite aucunement les thématiques reprises sur notre blog.

 

AXE 2 – Des marques professionnelles ethno-centrées. 

 

Dans le marketing des marques françaises, on remarque également non pas une sous-représentation, mais presque une « non représentation » des clients ethniques.  Les égéries des marques d’instituts de beauté et de spas semblent s’être clonées en une femme blanche et relativement jeune aux cheveux bruns (ou blonds cendrés) et lisses. Remarquez que c’est peut-être moins vrai auprès des marques anglo-saxonnes, mais je n’ai fait l’exercice que pour les marques françaises et sud-africaines.

Anne Semonin, Carita, Darphin, Decléor, Filorga, Germaine de Capuccini, Mary Cohr, Payot, Sothys, Thalgo, Yves Rocher…  Aucune représentation d’une cliente ethnique.  Même chose pour les marques aux univers plus « exotiques » : Cinq Mondes, La Sultane de Saba, Phyto 5, Thémaé, Yon Ka… Et, plus étonnant, pareil pour plusieurs marques spa et cosméceutiques africaines: Africology, Rain ou Environ.

On retrouve toutefois chez EvadéSens, une Reine d’Egypte à la peau couleur miel mais ici, davantage pour évoquer un univers historique et mythique que pour représenter une cliente.

La seule exception que nous ayons trouvée est la marque Bernard Cassière où une cliente à la peau noire reçoit les soins de la gamme baptisée … « Tribal », inspiré de recettes ancestrales africaines, mexicaines et polynésiennes.  Un demi-bonheur donc puisque certes, enfin, une modèle noire est l’égérie d’une gamme, mais hélas, elle ne semble que renforcer le côté exotique du soin.

Alors évidemment, on invoquera le fait que l’on s’adresse à une cible principale, large et consensuelle , mais ce constat a de quoi interpeler au regard des avancées réalisées par les marques « grand-public » qui ont compris qu’une cliente blanche pouvait tout à fait s’identifier à une égérie noire, comme inversement.

Pareillement, au niveau des menus de soins, pourquoi ne pas inclure davantage de soins correspondant aux spécificités des peaux foncées et aux envies de la clientèle afro: spas du cheveu, soins volumateurs (non, tout le monde ne veut pas forcément mincir!), peelings doux, actifs spécifiques… 

 

 AXE 3 – le manque d’intelligence culturelle et de diversité dans les spas et instituts.

 

A l’heure où les instituts courent après de nouveaux clients, la question d’une ouverture à plus de diversité devrait naturellement se poser compte tenu de l’évolution sociétale qui va vers une plus grande multiculturalité et un pouvoir d’achat important pour de nombreux clients issus des minorités ethniques.

Pourtant je suis toujours étonnée du malaise de certains professionnels lorsqu’ils sont confrontés à des clientes qui, comme moi, ont une peau foncée.  Des lacunes dans le conseil tout d’abord, pour les raisons évoquées plus haut.  Mais surtout, des lacunes dans l’accueil.  J’ai personnellement déjà subi ce scanning un peu suspicieux me balayant de la tête aux pieds et des pieds à la tête, le fameux « je peux vous renseigner ? » accompagné d’un langage corporel sur la défensive qui sonne comme un « pffff, qu’est-ce qu’elle fait ici ? ».  Des phrases exagérément articulées (comme si je ne comprenais pas le français), une impatience voire une irritabilité non masquée lorsque je pose des questions très spécifiques (déformation professionnelle) ou même des « pour vous, nous avons une petite gamme pas trop chère qui devrait vous plaire… » qui en disent long sur les préjugés bien ancrés dans l’esprit de certains praticiens et le manque d’intelligence interculturelle. 

Ce genre de situations vexatoires fait que les clientes à la peau foncée ne se sentent parfois pas très à l’aise dans les instituts de beauté ou dans les spas.  Elles ont l’impression qu’elles n’y ont pas leur place.  Une idée encore largement répandue dans la communauté afro où on entend souvent « les spas, c’est pour les Blancs, on a pas ça chez nous. » Et c’est en partie vrai pour la diaspora (1ère génération) car la fréquentation du spa n’est culturellement pas fréquente (sauf en Afrique du Nord).  Mais cette affirmation ne vaut pas pour les afro-descendants nés en Europe, intégrés à la culture occidentale mondialisée. 

Cet état de fait changerait certainement si les minorités se reconnaissaient un peu plus dans la proposition de l’industrie wellness.  Et là, au-delà des compétences techniques, de la qualité de l’accueil, d’une politique volontariste dans le choix de marques et soins inclusifs, le recrutement d’un personnel au profil moins standardisé peut lui aussi avoir une influence sur l’ouverture à un marché plus vaste et plus varié. 

Je ne parle pas d’instaurer des quotas ou de discrimination positive à l’engagement.  Les praticiens issus de la diversité regorgent tout autant de talents que les autres.  Ils n’ont pas besoin de passe-droit légal mais bien d’ouverture d’esprit! J’ai personnellement la chance d’occuper actuellement le poste de formatrice nationale (Belgique Luxembourg) pour une très belle marque (Sothys pour ne pas la nommer 😉 ).  C’est la première fois qu’une femme de couleur occupe ce poste d’ambassadeur, un poste très exposé.  Les mentalités évoluent donc et je suis consciente de jouer le rôle de modèle inspirant pour toute une série de personnes. 

Mais revenons aux faits observés.  Ma fonction de formatrice me donne l’opportunité de visiter énormément d’instituts de spas qualitatifs et d’en rencontrer les équipes.  Les esthéticiennes issues des « minorités visibles » y sont une véritable exception.  Pourtant, voir des femmes qui leur ressemblent travailler dans les spas à des postes de praticiennes et de responsables pourrait certainement contribuer à faire que les clientes ethniques s’y sentent clairement en terrain ami.

 

AXE 4 – Des clientes pas assez exigeantes.

 

Mais soyons de bon compte, parmi les clientes, il y a aussi un réel travail d’éducation à mener !  Si la communauté noire, très consommatrice de produits cosmétiques (capillaires, make-up, crèmes), s’est largement fédérée et à fait entendre sa voix dans une volonté d’obtenir des produits qui correspondaient vraiment à leurs attentes, il n’en va pas de même pour les soins esthétiques en institut et encore moins pour le bien-être.  

Car au-delà de l’efficacité visible et ressentie des soins, les instituts et surtout les spas offrent un réel bien-être auquel chacune a le droit d’aspirer.  Les soins prodigués invitent au lâcher-prise, à l’introspection et à la relaxation.  Pousser la porte d’un professionnel fait donc partie d’une démarche plus large d’estime de soi, d’équilibre, voire d’empowerment. Et compte tenu du pouvoir d’achat de plus en plus grand des femmes (et hommes!) noires et métissées et du niveau de stress global augmentant (qu’on soit employée, cadres, entrepreneure, sportives de haut niveau…), elles devraient être de plus en plus nombreuses à fréquenter les espaces wellness. 

A propos du stress, il est à noter que le bien-être mental est parfois encore un sujet un peu tabou dans la communauté.  En effet, pour des raisons systémiques, les femmes noires doivent travailler/exceller deux fois plus que leurs collègues caucasiennes pour avoir de l’avancement et être considérées comme crédibles.  A ce stress professionnel s’ajoute un contexte familial très patriarcal, voire religieux, qui fait reposer sur les femmes actives une charge mentale très importantes et un réel besoin d’avoir des espaces où elles pourraient lâcher prise et que l’on prenne soin d’elles. 

Mais pour être certaine que l’expérience se passe bien, les choses étant objectivement ce qu’elles sont, il convient de se renseigner sur l’endroit où l’on compte se rendre.  Par le bouche à oreille (souvent le meilleur moyen de ne pas se tromper), en consultant les avis de clients sur le web, les bonnes adresses reprises dans les articles de presse spécialisées et, surtout, en osant poser toutes ses questions lors de la prise de rendez-vous et lorsque l’on est en cabine.

Enfin, lorsque l’on est déçu de l’expérience vécue, il ne faut surtout pas hésiter à faire part de son ressenti directement (ou rapidement, par écrit) au responsable du spa.  Il ne faut jamais avoir peur d’être exigeante.  Donner son avis est une formidable opportunité pour l’établissement de se remettre en question et de progresser vers un service toujours plus exceptionnel.

Attirer la génération C : House of Tara Summer Beauty Boot Camp.

House of tara beauty camp

« Que les clients vivent la marque ».  Une obsession des équipes marketing quand ‘vendre des produits’ ne suffit plus et qu’il s’agit de transformer les clients en ambassadeurs passionnés, voire, en réels commerciaux.  Un exercice encore plus intéressant (et ardu) si on veut attirer et fidéliser de jeunes consommateurs, la fameuse génération ‘C’ (pour communication, collaboration, connexion et créativité).  C’est dans cette optique que la marque nigériane de maquillage House of Tara réitère son Summer Beauty Boot Camp.

Les préoccupations de la génération C.

Alors, à quoi ressemble-t-elle notre ado africaine et quelles sont ses aspirations ? Née après 1995, elle appartient à la génération C (aussi appelée génération Z, selon votre école marketo-sociologique).  Tentative de photographie.

  • Connectée: avec un taux de pénétration allant jusqu’à 124% au Mali, la jeunesse africaine est accrochée à son portable et l’accès au web s’y fait quasi exclusivement via le mobile.  ¾ des 11-20 ans est présent sur au moins un réseau social.  Elle est en contact quotidiennement avec des centaines de marques.  Se démarquer, attirer son attention et la fidéliser est un challenge.
  • Collaborative : elle a un réel besoin d’appartenance à un groupe dont elle est un véritable acteur, de partager des expériences et son expertise (blog, forums, réseaux sociaux, Youtube), de collaborer, de communiquer, de nouer des contacts humains…  La différence entre contacts réels et contacts virtuels est d’ailleurs de plus en plus floue, le tutoiement est de mise, ce qui peut être perçu comme un manque de respect.
  • (en) Construction identitaire et recherche de valeurs: elle cherche ses marques, « n’écoute » ni ses parents ni les institutions.  Aussi les marques peuvent-elles espérer les séduire en leur fournissant une expertise, en devenant une marque tuteur.  Enfant de la mondialisation, elle aime autant les marques chiques et trendy parisiennes que les approches traditionnelles africaines.  Elle cherche du sens dans ce qu’elle entreprend.
  • Créative : elle a beau vouloir appartenir au groupe, elle veut exprimer sa singularité. Elle recherche une personnalisation extrême des biens et services.  Elle n’a pas peur de sortir des sentiers battus, d’innover et de proposer sa propre vision.
  • Clairement ambitieuse : là où leurs ainées de la génération Y misait davantage sur l’équilibre boulot/vie de famille, les jeunes de la génération C veulent réussir dans la vie, une réussite qui se mesure en dollars sonnants et trébuchants.
  • Carrément narcissique : reine du selfie, elle maîtrise son image (surtout en ligne), le maquillage et Photoshop sont ses amis.

Summer Beauty Boot Camp : le concept.

A partir de ce constat, quelles stratégies mettre en place pour les attirer, provoquer de l’engagement et, éventuellement, repérer les potentielles futures commerciales?  Il faut en effet noter que House Of Tara continue son expansion presque exclusivement via un réseau de distributrices indépendantes.

Le Summer Beauty Boot Camp, ce sont deux semaines intenses et créatives pour les filles âgées de 13 à 17 ans.  Des ateliers pratiques dispensés par des formateurs sélectionnés par la marque, pour aider à inculquer la confiance en soi et développer des compétences dans divers domaines :

  • Cosmétiques : maquillage (naturellement !), beauté du corps, du visage, des cheveux.
  • Mode afro : fabrication de bijoux, de tissus, noué du foulard…
  • Entreprenariat : empowerment, leadership, comptabilité, gestion de sa carrière…
  • Vie : bonne manières, cours de cuisine…

La future génération de leaders créatifs.

L’Afrique est un continent jeune.  Avec 200 millions d’habitants âgés de 15 à 24 ans, l’Afrique a la population la plus jeune au monde.  Une jeunesse dont le souci majeure est de trouver de l’emploi.  Une préoccupation qui touche naturellement aussi leurs parents.

Si House of Tara oriente sa communication vers la génération C, elle le fait encore davantage vers leurs parents, inquiets pour l’avenir de leur enfant.  Avec un boot camp dont la base line est « The next Generation of Creative Leaders » et des questions comme « Que font vos enfants cet été ? » ou « Votre fille a-t-elle ne serait-elle pas douée pour le management, la beauté ou la mode ? », House of Tara sait qui va réellement financer le stage.

Un stage de 15 jours en internat pour un coût d’un équivalent d’environ 400 $.  « Investissez dans leurs compétences » dit le prospectus.  Investissement.  C’est le cas de le dire quand on sait que le salaire moyen au Nigéria est de 120$/mois (source : Banque mondiale, 2012). 

 

>>>  S’inscrire ou en savoir plus ? summerbbc@houseoftara.com.

(c) Photo House Of Tara http://www.houseoftara.com